Revue de Presse

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Des carriers d'un autre temps

L'Yonne Republicaine, édition du vendredi 18 novembre 2011.

La vallée de la Cure abrite, outre les grottes d'Arcy-sur-Cure et le camp gallo-romain de Cora, une carrière de sarcophages mérovingiens.

Une phrase de Jean-Jacques Lebret, l'un des spéléologues qui explora dans les années quatre-vingt-dix les grottes d'Arcy-sur-Cure, résume assez bien l'intérêt de ce pittoresque virage de la Cure : «Par une espèce de miracle, la nature a rassemblé ici tout ce qui peut à la fois exciter et combler le goût d'inconnu et d'aventure que peuvent concevoir un touriste en une heure et un passionné en une vie.»

Exploitée jusqu'au XIIIe siècle

L'explorateur faisait allusion évidemment aux grottes ornées d'Arcy-sur-Cure, au camp de Cora, à la voie romaine d'Agrippa, mais aussi à la carrière mérovingienne qui entaille le massif corallien. La carrière de la Roche-Taillée, c'est son nom, a beau n'être plus exploitée depuis 800 ans, elle garde encore aujourd'hui les traces de son exploitation. Ça et là, on distingue aisément des blocs à demi dégagés. La technique utilisée à l'époque était simple mais plutôt efficace : pour extraire des blocs trapézoïdaux, les ouvriers creusaient des saignées de havage autour du volume à détacher. Cela permettait d'introduire des coins de bois secs que l'on arrosait d'eau. Le bois en se dilatant provoquait l'éclatement de la roche. Le chantier était immense et la charge de travail importante quand on sait que les carriers ont creusé un front de taille de 85 mètres de long sur 25 mètres de haut.

La période mérovingienne (entre 400 et 700 après J.C.), pourtant pas si éloignée de notre ère, est l'une des plus obscures de notre histoire. Les hommes n'ont laissé que peu de monuments et quasiment aucun texte détaillant leur quotidien. Toutefois on retrouve partout en France, et particulièrement en Bourgogne, d'innombrables sépultures ou les morts gisent dans des coffres de pierre très caractéristiques : des sarcophages. Il semble que la carrière de Saint-Moré était dévolue à cette activité. Des sarcophages auraient même été taillés sur place. Évidemment les fouilles menées dans les environs ont révélé quelques pièces de choix. Dans le parc du château de Saint-Moré, les archéologues ont ainsi déterré un curieux sarcophage à trois places, mais avec seulement deux squelettes à l'intérieur. Des travaux de voirie ont inopinément mis à jour un exemplaire particulièrement ouvragé. Ce dernier est visible dans l'église du village.

Édouard Roussel

Article mis en ligne le : 28 novembre 2011